Joseph Kabila, jadis maître du jeu politique congolais, se retrouve aujourd’hui dans une partie d’échecs où chaque pion semble vouloir le capturer. L’ancien président, longtemps tapi dans l’ombre du pouvoir, voit ses marges de manœuvre se réduire comme peau de chagrin. La Constitution, qu’il a si souvent contournée à sa guise, lui renvoie désormais l’ascenseur: aucune échappatoire, aucun joker. Ironie du sort, non?
Condamné à la peine de mort, suspension du PPRD, mise à l’écart de ses fidèles. Le château de cartes s’effondre. Et que dire de son initiative "Sauvons le Congo"? Un slogan creux, un baroud d’honneur sans écho. Le pays ne veut plus de sauveur autoproclamé, surtout pas de celui qu’on accuse d’avoir allumé les braises des conflits à l’Est. Traître, disent certains. Complice, murmurent d’autres. Dans tous les cas, la légitimité s’est évaporée.
Mais ce qui rend son isolement encore plus cruel, c’est l’abandon progressif de ses anciens parrains internationaux. Washington, autrefois pragmatique, regarde ailleurs. Pékin, qui l’avait adoubé pour ses deals miniers, semble désormais miser sur des figures plus stables. Même Kigali, longtemps allié ambigu, ne semble plus disposé à lui tendre la main. Dans ce grand jeu d’échecs géopolitique, Kabila n’est plus qu’un pion sacrifiable. Et personne ne veut se brûler les doigts à le défendre.
Alors que lui reste-t-il? Une sortie négociée? Trop tard. Une dénonciation théâtrale du Rwanda? Peu crédible, venant de celui qui a longtemps fermé les yeux. Une rébellion? Illusoire, dans un pays où les alliances se font et se défont au gré des intérêts extérieurs. Kabila est piégé, non seulement par ses propres erreurs, mais aussi par un monde qui a changé de logiciel. L’Afrique centrale n’est plus le terrain de jeu des autocrates impunis. Du moins, plus comme avant.
La vraie question n’est plus "que va-t-il faire?", mais "qui, à Kinshasa ou à l’étranger, a encore intérêt à ce qu’il fasse quoi que ce soit?"
Par Roger Amani, journaliste éditorialiste — analyste politique.
