Le philosophe congolais et professeur d’université Valentin-Yves Mudimbe, l’un des penseurs les plus influents du continent africain, est décédé le 22 avril 2025, à l’âge de 83 ans, en Caroline du Nord, aux États-Unis, où il résidait depuis de nombreuses années.

Né le 8 décembre 1941 à Likasi, dans le Haut-Katanga, Valentin-Yves Mudimbe fut d’abord formé dans la tradition classique, auprès des moines bénédictins, allant jusqu’à entreprendre un noviciat. Cependant, à 21 ans, il choisit de quitter la vie religieuse pour se consacrer à l’étude de la philosophie à l’université de Louvain, en Belgique.

De retour au Congo, il enseigne à l’université de Lubumbashi et s’investit activement dans la vie intellectuelle locale, participant à de nombreuses revues. Toutefois, le contexte politique sous le régime de Mobutu le pousse à l’exil en 1979. Il se rend d’abord en Europe, puis aux États-Unis, où il devient professeur à l’université Stanford.

Romancier, poète, mémorialiste, Valentin-Yves Mudimbe laisse surtout une empreinte indélébile par ses essais et travaux théoriques. Son ouvrage majeur, L’Invention de l’Afrique, est devenu une référence incontournable dans le champ des études africaines. À travers ses recherches, il a profondément interrogé et déconstruit le regard occidental posé sur l’Afrique, introduisant le concept de « bibliothèque coloniale » pour désigner l’ensemble des discours produits par les explorateurs, anthropologues et missionnaires qui ont contribué à forger l’image du continent.

Convaincu de la nécessité de construire un savoir africain sur l’Afrique, Mudimbe s’est attaché tout au long de sa vie à constituer une véritable « bibliothèque africaine », où le continent pourrait enfin s'exprimer en son propre nom. Son œuvre, riche d’une quarantaine d’essais, a ouvert la voie à une nouvelle génération de chercheurs et d’intellectuels soucieux de repenser l’histoire, la culture et la philosophie africaines hors des cadres imposés par l’Occident.

Valentin-Yves Mudimbe laisse derrière lui un legs intellectuel immense, qui continuera d’inspirer les esprits désireux de questionner les représentations et de penser l’Afrique autrement.