Alors que les projecteurs diplomatiques sont braqués sur Washington, où doit être signé ce jeudi un accord de paix entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, la réalité sur le terrain est tout autre: la guerre s’intensifie dans les provinces du Kivu, et les civils paient le prix fort.
Dans un message poignant, le Dr Denis Mukwege, prix Nobel de la paix, alerte sur l’ampleur des violences: « La population subit une immense souffrance et meurt comme des mouches sous les bombes des belligérants, à l’instar de la situation qui prévaut à Kaziba, à Katogota ou à Kamanyola au Sud-Kivu. »
Le 2 décembre, à Kaziba, plus de 20 civils, dont des femmes et des enfants, ont été tués selon la société civile locale. Des témoignages évoquent des bombardements aveugles et des scènes de panique dans les villages pris en étau entre les forces en présence.
Un accord de paix sous le feu des critiques
L’accord de Washington, censé mettre fin à la guerre dans l’Est du pays, est déjà contesté par de nombreuses voix congolaises. Pour Mukwege, la paix ne peut être décrétée sans justice: « Une enquête indépendante s’impose sans tarder pour traduire les responsables en justice et prévenir la répétition de ces atrocités. »
Alors que le président Félix Tshisekedi s’apprête à parapher ce texte aux côtés de son homologue rwandais Paul Kagame, sous l’égide des États-Unis, les critiques fusent. Beaucoup dénoncent un processus opaque, éloigné des réalités du terrain, et craignent que les intérêts géopolitiques ne prennent le pas sur les droits des victimes.
La paix, mais à quel prix?
Dans les rues de Goma, Bukavu ou Uvira, l’espoir d’un cessez-le-feu durable se mêle à une profonde méfiance. Les précédents accords n’ont pas empêché la résurgence des violences, et les populations locales redoutent que cette nouvelle initiative ne soit qu’un écran de fumée.
À la veille de la signature, une vérité s’impose: sans justice, sans reconnaissance des crimes commis, et sans écoute des victimes, la paix risque de rester un mirage.
Roger AMANI
